Condamnation par la Cour de justice de la Seine – Exposé des faits

PARQUET

DE LA

COUR DE JUSTICE

DU DEPARTEMENT DE LA SEINE

 

AFFAIRE : DAUDET Georges Adrien Valentin

44 ans, journaliste

 

-EN FUITE-

(M.A. du 27-1-1945

 

Inculpé d’intelligences avec l’ennemi.

 

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Après l’armistice de juin 1940 Georges DAUDET devint l’administrateur-gérant de la « France au Travail ». Journal qui bientôt périclita faute de lecteurs.

Le 31-10-1941 avec l’équipe de journalistes qui avaient apporté une collaboration à la « France au Travail » feuille, qui dès l’origine, aurait été très largement subventionnée par Pierre LAVAL et par l’Ambassade d’Allemagne.

Or le nouvel organe avait Georges DAUDET comme Directeur Général et pour Directeur Politique le nommé René CHATEAU.

Le but poursuivi par les dirigeants du Journal qui fut toujours violemment anti sémite et anti maçonnique était de recréer une large clientèle parmi les militants des anciens partis de Gauche et d’extrême gauche.

L’argent ne manquant pas, la direction de la « France socialiste » n’hésita pas à fournir précisément pour atteindre ce but plus facilement un très grand effort de propagande, elle organisa notamment des compétitions sportives et des manifestations artistiques « les tréteaux chantants » et elle fit distribuer chaque jour aux lecteurs du journal des primes importantes.

 

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Il est ici à peine besoin de rappeler que la « France socialiste » fut l’un des journaux de la France occupée ayant le plus efficacement épaulé la propagande de l’ennemi.

Il est donc certain que par le seul fait d’avoir occupé jusqu’à la libération le poste de Directeur général de la « France socialiste » Georges DAUDET a été l’un des personnages des plus en vue dans le monde des collaborateurs de l’ennemi.

Et si Georges DAUDET n’a écrit pour ainsi dire aucun article durant l’occupation (un seul article a en effet paru sous sa signature dans la « France socialiste » article présentant au journal un nouveau collaborateur du journal l’ex-ministre Lagardelle).

Il n’en reste pas moins évident que cet inculpé ne pouvait pas ne pas être imprégné de l’esprit de la maison qu’il désignait, esprit qui par la force des choses, n’était à la vérité qu’un reflet du sien.

 

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Dans le compte rendu de la séance d’une « ligue socialiste » ou prétendu telle – qu’il avait présidé le nommé René CHATEAU a d’ailleurs révélé que Georges DAUDET dont le souci constant et manifeste était de ne pas indisposer les autorités occupantes lui avait à plusieurs reprises demandé de faire des concessions au national-socialisme et de se plier aux consignes données par la censure allemande.

 

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Georges DAUDET a, au surplus, si bien compris que sa collaboration avec l’ennemi l’exposait à de justes représailles qu’il a furtivement quitté son habituel domicile le 17-9-1944.

Et il a été depuis lors activement recherché.

 

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Il est vrai qu’en cours d’information c’est-à-dire dans le courant 1945 le magistrat instructeur a reçu une lettre apparemment signée par Georges DAUDET l’avisant que ledit Georges DAUDET se présenterait sous peu à son cabinet.

Or l’on ne peut que constater que Georges DAUDET, à le supposer bien entendu, l’auteur de la lettre en question n’a point tenu parole.

Un soi-disant ami de Georges DAUDET a en outre, fait parvenir une note signée « Georges DAUDET » note qui affirme que ce dernier a en somme fait du très bon travail tant à la « France au travail » qu’à la « France socialiste puisqu’aussi bien il avait réussi à « liquider » les équipes pro nazies de ces 2 journaux et à les remplacer par d’autres confrères journalistes dont certains le révèrent encore à l’heure actuelle.

Il convient enfin d’indiquer pour mémoire que Georges DAUDET a évidemment collaboré de 1942 à la Libération, en qualité de gérant, à l’administration d’un troisième journal « L’Effort socialiste » qui paraissait à Lyon ;

 

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Casier et renseignements :

 

Le casier de l’inculpé ne mentionne aucune condamnation.

Cependant un rapport de police révèle que Georges DAUDET aurait été condamné le 11-3-1943 par la Cour de Paris à 500 francs d’amende pour tentative d’escroquerie.

 

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Attendu qu’il résulte de l’exposé ci-dessus charges suffisantes contre le nommé DAUDET Georges Adrien Valentin d’avoir à Paris ou sur le territoire national de la France, dans le courant des années 1940, 1941, 1942, 1943, et 1944 en tout cas entre le 16 juin 1940 et la date de la Libération avec l’intention de favoriser les entreprises de l’ennemi étant Français, entretenu des Intelligences avec une puissance étrangère ou avec ses agents en vue de favoriser les entreprises de cette puissance contre la France.

Crime prévu par les articles 75-5 et suivants du Code Pénal (modifié par le décret-loi du 29 juillet 1939) et par les articles 1 et 2 de l’Ordonnance du 28 novembre 1944.

Renvoyons le susnommé devant ladite Cour de Justice pour y être jugé conformément à la Loi.

 

LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT ADJOINT

 

Condamnation par la Cour de justice de la Seine – Pièce 26, Note manuscrite du Chef de Bataillon André Lalande

AN Z/6/417, extrait 4221, pièce 26, Note manuscrite du Chef de Bataillon André Lalande

Rapport au sujet de Monsieur Georges DAUDET

Un légionnaire que je connais bien est venu me trouver le jour de sa démobilisation pour m’expliquer sa situation et me demander conseil.

Son nom réel est Georges Daudet, sa déclaration sur les faits que la Justice pourrait avoir à lui reprocher est jointe.

Je puis certifier qu’il s’est engagé en Février 1945 à la Légion Etrangère, a tenu sa place dans son Bataillon en secteur sur le Rhin au début de Mars et dans les attaques dans les Alpes Maritimes (Campagne de …illisible…, de …..illisible…. et de ..illisible). Je puis dire aussi qu’il a fait mon admiration par son travail, son dévouement de toutes les minutes, son désir de servir.

Engagé volontaire à 43 ans – pris à la visite médicale sur sa demande, car sa santé est très médiocre (rhumatisme – goutte) je l’ai toujours trouvé à son poste, au travail, alors qu’il n’avait qu’un mot à dire pour se faire hospitaliser. En un mot j’ai pour lui de l’estime et j’éprouve même à son égard une réelle admiration pour ce qu’il a fait sous mes ordres.

Son passé est ce qu’il est – pas bien loin noir sans doute et ses déclarations peuvent facilement être vérifiées. Voilà un garçon qui s’est trompé en 1940 ; il n’a cessé pourtant de vivre suivant sa conscience et n’a pas hésité à s’engager pour aller se battre, à l’heure où tant de jeunes français ne songeaient qu’à la politique la plus mesquine ou aux profits faciles du marché noir.

Quelques précisions sur son histoire. A la libération de Paris voulait se présenter à la Préfecture, en a été dissuadé par ses amis de la Résistance, car c’était l’heure de la justice sommaire. Ne s’est pas engagé immédiatement car sa femme était enceinte et disposait de peu de ressources, puis parce qu’il est tombé sérieusement malade.

Actuellement, il ne connait pas sa situation car des policiers sont bien venus à son domicile mais n’ont jamais notifié de mandat d’arrêt contre lui. Sa femme n’a pas été inquiétée.

J’ai donc l’honneur de demander :

1) s’il est recherché par la Justice et dans l’affirmative sous quelle inculpation

2) comment il doit faire pour être lavé, blanchi et reprendre sa vie au grand jour. Il veut bien aller en prison et être jugé si la justice l’exige mais est très ennuyé pour sa femme et ses deux enfants qui seraient dans la misère.

Enfin, s’il a pêché, je voudrais que l’on tienne compte de sa bonne volonté. Tant de Français ont été trompés en 1940 que leur procès serait celui de la France. Je ne prétends pas tout connaître de lui et je ne veux pas le soustraire à la loi, mais pourtant je le connais mieux que les juges qui rapidement traiteront son cas après celui d’un autre, avant le suivant et mon témoignage a sa valeur. Enfin, il a cherché à se racheter moins de ses fautes que de ses erreurs et il a tout pour faire un bon mari et un bon père doublé d’un très bon français.

Lalande

Chef de Bataillon 13ème Demi Brigade de Légion étrangère

La réponse à cette note pourrait être envoyée à Monsieur le Capitaine Aumonier Malec Centre d’Accueil Amilakvari 112 Avenue de Gravelle (ENT 2076), St. Maurice, Seine, en rappelant mon nom.

Je serai dans la région parisienne jusqu’au 20 ou 25 août et après le 20 septembre. Je pourrais donc apporter tous renseignements complémentaires si nécessaire.

Police française – Confédération Nationale des Comités de Salut Public et Forces Françaises (1939)

AN F/7/14819, 2 BL 52

Confédération nationale des Comités de salut public ; enquêtes au sujet des ressources du mouvement et du journal  » Forces françaises » ; dossier personnel du sieur Daudet, dit Delhaume, directeur du journal ; 1939.

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2 BL 52

Directions des affaires criminelles et des grâces, 1er bureau

Enregistré le 5 mai 1939

« Forces Françaises », journal du 22- 4 -1939

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PARQUET DE LA COUR D’APPEL DE PARIS                                                      Paris, le 9 mai 1939

Le Procureur Général près la Cour d’Appel de Paris

à Monsieur le Grade des Sceaux

N° 2046 Presse

Service central

Direct : Criminelle

1er Bureau

2 BL 52/R

Ouverture d’une information c/les

dirigeants du journal

« Forces Françaises ».

Me référant à votre dépêche du 6 mai 1939, j’ai l’honneur de vous faire connaître que mon Substitut de la Seine a requis le 6 mai courant l’ouverture d’une information contre le nommé DAUDET, Directeur du Journal « Forces Françaises » et à tous autres, du chef d’infraction à l’article 1er du décret-loi du 21 avril 1939 sur les propagandes étrangères.

M. COMBEAU, juge d’instruction, a été chargé de cette affaire dont je ne manquerai pas de vous faire connaître les suites.

LE PROCUREUR GENERAL

Signé : Raoul CAVARROC

*****Nouvelle page*****

L/C

MINISTERE de la JUSTICE

9 MAI 1939

CABINET

PARQUET

du

TRIBUNAL

de

PREMIERE INSTANCE

du

DEPARTEMENT DE LA SEINE

4ème Section

Service Central

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

à Monsieur le PROCUREUR GENERAL

2046 Presse

J’ai l’honneur de vous transmettre le numéro du journal « Forces Françaises » portant la date du 22 avril 1939 qui m’a été signalé par M. le Directeur de la Police Judiciaire.

Celui-ci indique, dans le rapport dont copie est jointe, que les ressources de la « Confédération des Comités de Salut Public », groupement dont le journal précité est l’organe, ne sont pas nettement établies. Il ajoute que, le président de ce groupement qui habite en hôtel, étant aussi membre de la « Ligue Internationale contre le communisme » dont le siège est à Genève, il pourrait peut-être y avoir lieu pour mon Parquet de requérir l’ouverture d’une information basée sur le décret-loi du 21 avril dernier, réprimant les propagandes étrangères, dans le but de déterminer la provenance des fonds nécessaires au journal précité et au groupement dont il entend répandre la doctrine.

Le numéro du journal « Forces Françaises » portant la date du 22 avril 1939, publie :

1°) en 1ère page un article intitulé « Deux poids et deux mesures » et en 4ème page un article intitulé « John BULL l’embusqué n°1 de la prochaine dernière » dont les auteurs attaquent violemment l’Angleterre, et où l’on relève les passages suivants :

se reporter à la reproduction intégrale du journal disponible en téléchargement ici

2°) en 1ère et 2ème page un article intitulé « Perfidie Soviétique » dont l’auteur attaque violemment l’U.R.S.S.

3°) en 3ème page un article intitulé « La Guerre avec l’Allemagne est-elle fatale ? » où l’on relève les passages suivants :

se reporter à la reproduction intégrale du journal disponible en téléchargement ici

Le sens de ces articles, les buts que semblent se proposer leurs auteurs, certains des termes même employés, peuvent donner à penser que les fonds nécessaires à cette propagande sont de provenance étrangère ; au surplus, M. le Directeur de la Police Judiciaire a fait connaître que le sieur DAUDET, dit DELHAUME, président de la Confédération des Comités de Salut Public et directeur du journal « Forces Françaises » ne cachait pas ses sympathies ardentes en faveur des régimes fascistes et hitlériens. Aussi les moyens d’existence du susnommé étant mal définis une information me semble devoir être ouverte, en vertu de l’art. 1er du décret-loi du 21 avril 1939.

L’on pourrait certes penser que le décret dont s’agit n’ayant été promulgué que le 25 avril 1939 ce texte ne saurait trouver son application au regard d’un numéro de journal paru le 22 du même mois. Mais il convient d’observer que le groupement dit « Confédération des Comités de Salut Public » dont le journal « Forces Françaises » est l’organe continue de propagande et qu’ainsi le texte susvisé peut recevoir son application.

Dans ces conditions, j’ai l’intention, sauf instructions contraires de votre part, de requérir contre DAUDET et tous autres l’ouverture d’une information basée sur l’art. 1er du décret-loi du 21 avril 1939.

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

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Ministère de l’Intérieur

Direction générale de la Sureté Nationale

Inspection Générale

Services de Police Criminelle

Dossier 060167

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9 mai 1939

CH.14760

L’INSPECTEUR GENERAL

chargé des Services de la Police Criminelle

à Monsieur le PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

Comme suite à votre lettre, en date du 1er Mai courant, relative à l’activité du sieur DAUDET, dit DELHAUME, directeur du journal « Forces Françaises » et membre de la « Ligue Internationales anti-communiste », dont le siège serait à Genève, j’ai l’honneur de vous transmettre, sous ce pli, un rapport établi le 5 de ce mois par un fonctionnaire de mes services, à ce sujet.

L’INSPECTEUR GENERAL

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Le Commissaire de police mobile Pierre CHABOT

à Monsieur l’INSPECTEUR GENERAL des Services de Police Criminelle

Conformément à vos instructions et en exécution de la demande de renseignements adressée à nos services le 1er Mai courant, par M. le Procureur de la République près le Tribunal de la Seine, concernant les agissements en France de la « Ligue Internationale anti-communiste » dont le siège serait à Genève, et signalant le sieur DAUDET, dit DELHAUME, Directeur du journal « Forces Françaises », comme membre de ce groupement, j’ai l’honneur de vous rendre compte des investigations que j’ai effectuées à ce sujet :

Le nommé DAUDET, Georges, Adrien, Valentin, dit « DELHAUME, Georges », né le 11 mars 1902 à Chaillac (Indre), Ingénieur civil des Travaux Publics de l’Etat, demeure actuellement 3 rue Colette (17e) depuis le 29 Décembre 1938, dans un studio au loyer mensuel de 500 francs. Divorcé sans enfant, DAUDET vit seul à cette adresse où on ne lui connait aucune fréquentation. Il n’y reçoit d’autre part que très peu de courrier.

Le susnommé habita précédemment 24 rue Francoeur, 57 rue des Petites Ecuries, 10 Bd Voltaire et antérieurement 17 Bd Magenta.

Se disant tour à tour ingénieur conseil ingénieur civil, fondé de pouvoirs, administrateur de sociétés, il fit partie, en 1937, de la « Société d’Application de la Loterie Gratuite », 14 Bd Montmartre.

Au point de vue politique, DAUDET a été candidat sans succès sous l’étiquette de républicain indépendant à l’élection municipale complémentaire du 9 février 1936 dans le quartier du Mail ainsi qu’à l’élection législative d’avril 1936 dans le 2e Arrondissement.

Le 24 juillet 1937, le passeport n° 47.358 lui fut délivré par la Préfecture de Police, mais à l’expiration de la validité de ce document DAUDET n’a présenté aucune demande de renouvellement.

DAUDET est noté aux sommiers judiciaires comme suit :

1 condamnation -50 frs – 12e Chambre – le 30 avril 1936

pour injures diffamation – Défaut – sous réserve d’amnistie

Au cours de ces dernières années, ses diverses activités ne semblent pas lui avoir toujours évité la gêne car il quitta ses divers domiciles, laissant des notes impayées qu’il aurait réglé par la suite assez difficilement.

DAUDET fonda la Confédération Nationales des Comités de Salut Public, association déclarée le 13 mai 1938 à la Préfecture de Police (Récépissé de déclaration délivré le 19 Mai 1938).

Aux termes de ses statuts, cette association a pour but de réaliser l’union des français dans le cadre des institutions et libertés républicaines.

Le siège est à Paris, 9 Cité du Retiro (8e) et il n’apparait pas qu’elle ait pris jusqu’ici beaucoup d’importance. Elle manifeste surtout son activité par la publication d’une feuille périodique intitulée « Forces Françaises », dont le Directeur est DAUDET, sous le nom de Georges DELHAUME, et dont la rédaction et l’Administration sont installées dans les mêmes locaux de la Cité du Retiro. (Tél : 60-91 – 60-92 – 60-93.

On ne connait pas d’employés qui pourraient aider DAUDET Georges dans sa tâche. Ce dernier, à la fois Directeur, Rédacteur et Gérant des Forces Françaises, travaille particulièrement la nuit, aux dires des témoins entendus.

Il est à noter que les locaux servant de siège à la Confédération Nationale des Comités de Salut Public ainsi qu’au journal précité, furent loués au mois de juillet 1937, par DAUDET, Georges. Composés de trois petites pièces au 3e étage d’un building, leur loyer de 2.200 francs par trimestre est actuellement au nom de la Confédération.

Cinq numéros du Journal « Forces Françaises » ont paru aux dates suivantes :

en 1938, les 27 Mai, 3 Juin, 23 Septembre, 1er Octobre, et en 1939 le 22 avril.

Le tirage a varié entre 5.000 et 10.000 exemplaires qui, imprimés d’abord 17 Villa d’Alésia, sortaient en ce qui concerne les trois derniers numéros des presses de l’Imprimerie DELION, 16 rue du Croissant (2e).

Il y a lieu de retenir, au sujet du numéro des Forces Françaises du 23 Septembre 1938, qu’un tirage supplémentaire de 45.000 exemplaires fut demandé à l’imprimerie DELION.

On y menait spécialement une campagne contre l’organisation intérieure de la Tchécoslovaquie et un plaidoyer en faveur de la minorité allemande envers laquelle le Gouvernement de Prague n’aurait pas tenu ses engagements.

Il convient, d’autre part, de signaler que les « Forces Françaises » du 22 avril 1939 contiennent des articles hostiles à l’Alliance Anglo Russe.

On ne peut s’empêcher de constater que cette publication parait uniquement à des moments de grave tension politique en Europe.

Je n’ai pu, au cours de mes investigations, découvrir l’origine des fonds dont DAUDET Georges semble disposer.

Par ailleurs, en ce qui concerne la « Ligue Internationale anti-communiste » dont le siège serait à Genève, il ne m’a pas été permis de déterminer si DAUDET en était ou en avait été membre.

Seule, une note rédigée en 1938 par les services de la Préfecture de Police signale que le susnommé est connu pour avoir fait partie de cette organisation, sans autre précision.

Il s’agirait d’ailleurs et vraisemblablement, non pas de la « Ligue Internationale anti-communiste » mais de « l’Entente Internationale anti-communiste », dont le siège est à Genève, 14 Promenade Saint-Antoine.

L’animateur et le Président de cette organisation est un nommé Théodore AUBERT, Avocat au Barreau de Genève, et Député du Parlement Suisse, qui, dans la lutte contre le communisme en général et le Komintern en particulier, se place essentiellement sur un plan idéologique.

Il n’apparait pas, à ma connaissance, que l’Association Genévoise puisse favoriser l’activité de DAUDET, Georges.

Néanmoins, lors de la 13e Conférence du Conseil International de l’Entente Internationale anti-communiste qui eut lieu à Genève fin Février dernier, un représentant de l’organisation française « L’Association de la Défense de la Nation », siège 15 rue Jean Jacques Rousseau, Paris 1er, – dont le secrétaire général est le Commandant LOUSTANAU-LACAU, dit Navarre, exposa la manière dont en France cet organisme avait intenté une action tendant à la dissolution du parti communiste français. Il indiqua que cette action avait déjà été appelée en conciliation et que les représentants communistes avaient fait défaut.

Il ne semble pas qu’il y ait une relation entre les agissements de DAUDET, Georges, et l’activité poursuivie par l’Association de Défense de la Nation.

Le Commissaire de police mobile.

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Paris le 29 mai 1939

N° E.232.385

L’enquête à laquelle il a été procédé en exécution des prescriptions contenues dans la commission rogatoire ci-jointe, et notamment dans le but de de rechercher les ressources qui alimentent l’action politique de la Confédération Nationale des Comités de Salut Public et son organe intitulé « Forces Françaises » n’a pas permis d’établir l’origine des fonds permettant à ce groupement de subsister.

Au cours de la perquisition effectuée le 9 courant au siège de la Confédération Nationale des Comités de Salut Public, 9 Cité du Retiro il a été saisi des documents et notamment de la correspondance, ayant trait à des démarches auprès de maisons de commerce de la région parisienne, en vue semble-t-il d’obtenir des contrats de publicité.

Il a été alors procédé à l’examen de la collection du journal « Forces Françaises » d’où il ressort que le N°1, en date du 27 mai 1938, ne comportait qu’une publicité pour la Loterie Nationale.

Le N°2 en date du 3 juin 1938, comporte une publicité pour les établissements DUBONNET, le N°3 du 23 septembre 1938, et le N°4 du 1er octobre 1938 ne comportent aucune publicité.

Enfin, le N°1 de la nouvelle série en date du 22 avril 1939, comporte à nouveau une publicité pour les établissements DUBONNET.

Il a donc été procédé à l’audition de diverses personnes susceptibles d’avoir fourni des contrats de publicité au dit journal.

Au sujet de la publicité DUBONNET, M. VIRTEL, Chef de ce service, a fait connaître qu’à la date du 21 avril 1939, il avait reçu la visite d’un sieur Georges DELHAUME, venu pour solliciter un contrat. Celui-ci lui fut refusé à titre payant, mais il lui fut remis un « galvano » pour insertion à titre entièrement gratuit, c’est-à-dire sans obligation de paiement, de la part de la maison DUBONNET.

D’après M. VIRTEL, les relations publicitaires n’auraient pas été poussées plus avant.

A toutes fins utiles, M. SEMGES, Clément, chef du service de la publicité à la maison VOLT, 3 rue Godot de Mauroy, à Paris, agent des établissements DUBONNET, a été entendu aux fins d’établir si le sieur DELHAUME, alias DAUDET, n’aurait pas sollicité de contrat, ce fut sans résultat.

Dans les mêmes conditions, M. MULIER, chef de la publicité de la maison ALBA, 16 boulevard Poissonnière, à Paris, a fait connaître par l’intermédiaire de M. BOILEAU, Emile, sous-directeur, qu’à aucun moment il n’avait passé de contrat de publicité soit avec M. DAUDET, soit avec le journal FORCES FRANCAISES.

Des vérifications ont été également effectuées auprès des maisons SAINT-RAPHAEL, QUINQUINA, sise 8 rue du Parc Royal et FERNET-BRANCA, 145 boulevard Magenta.

Les chefs de publicité de ces établissements ont déclaré également qu’à aucun moment ils n’avaient été sollicités pour fournir de la publicité au dit journal.

A la suite de ces vérifications, demeurées sans résultat, il a été procédé à l’audition des deux principaux ex-collaborateurs du sieur DAUDET, à savoir :

1°- M. VERNAY, Pierre, Robert, Théodore, né le 1er mars 1909 au Chili (Amérique du Sud), de nationalité française, demeurant 77 boulevard Beaumarchais, employé de commerce, actuellement en chômage.

Il a déclaré :

J’ai connu M. DAUDET, voici 5 ans, environ, alors que tous deux, nous appartenions au « Parti Social National ».

Cette association dissoute depuis 1935, je crois, avait son siège rue Weber, à un numéro dont je ne me souviens pas.

A cette époque, DAUDET se disait ingénieur.

Dans le courant de mai 1938, j’ai reçu une lettre de lui, à mon ancien domicile 20 rue des Tourelles, par laquelle il me demandait de passer le voir, à son domicile du moment, rue Francoeur, je crois.

M’y étant présenté, au cours de la conversation, il me demanda de lui apporter ma collaboration dans la constitution d’un parti, qu’il intitule « Confédération des Comités de Salut Public », et dont le siège était 9 Cité du Retiro. J’ai aussitôt accepté.

Dès le début de ces nouvelles relations, DAUDET, alors alité, me demanda de le remplacer, à une réunion organisée à l’ancien siège du « Parti social national » et de prendre, à l’occasion, la parole à sa place. J’ai accepté une fois de plus mais je n’ai pas eu à parler.

Je préciserai qu’au cours de cette réunion, je devais développer les grandes lignes et le programme de la Confédération des Comités de Salut Public.

En collaboration avec DAUDET, nous avons mis au point le programme, les statuts et l’organisation du nouveau groupement.

Par la suite, j’ai été chargé également de rédiger certains articles que j’ai toujours signés et notamment dans les N° 1 et 2 de FORCES FRANCAISES, parus en 1938, suivis de mon titre de rédacteur en chef.

Comme DAUDET ne me donnait aucune rémunération, et ce, malgré mes réclamations, j’ai purement quitté cet emploi, sans toutefois cesser nos relations amicales.

A aucun moment je n’ai été chargé de prospecter les maisons de commerce ou autres, susceptibles de fournir de la publicité au journal « FORCES FRANCAISES » ou d’y apporter des fonds. C’était M. LELIEVRE, qui en était chargé.

J’ignore totalement la provenance des ressources qui alimentaient la caisse du journal. A ce sujet, DAUDET ne m’a jamais fait aucune confidence.

Toutefois, je crois qu’il était assez fortuné, car il m’avait dit posséder des biens, en province, qu’il avait réalisés.

J’ai cessé toute collaboration avec M. DAUDET, mais je le rencontre fréquemment et pour la dernière fois quelques jours après la parution du N° 1 nouvelle série de FORCES FRANCAISES, c’est-à-dire fin avril 1939.

J’en ai profité pour lui demander où il avait trouvé les fonds nécessaires pour la parution de ce dernier numéro.

Il m’a déclaré avoir reçu de l’argent de sa famille notamment de sa mère et de sa sœur.

Je n’ai pas manqué de profiter de cette occasion pour lui demander, ou plutôt de lui laisser entendre que s’il avait quelque argent disponible, qu’il veuille bien me dédommager des frais que j’avais eu lors de notre collaboration.

A part Messieurs DAUDET et LELIEVRE, je n’ai connu aucune autre personne, au comité directeur de la Confédération des Comités de Salut Public.

2°- M. LELIEVRE Jean-Paul, né le 20 mars 1903 à Saint-Mandé (Seine), demeurant à Viroflay (Seine-et-Oise), 12 rue des Pleurs, entendu a déclaré :

J’ai connu M. DAUDET, au début de l’année 1937, dans les circonstances suivantes. A cette époque, étant chômeur, j’ai remarqué dans le journal « L’Intransigeant » une annonce demandant des démarcheurs pour le placement de billets de la Loterie Nationale et ce, pour le compte de la Fédération Nationale des Anciens Combattants et Mutilés anciens combattants, 14 boulevard Montmartre.

M’y étant présenté, je fus reçu par DAUDET, qui m’agréa immédiatement. Pendant un an, j’ai effectué le placement de billets chez divers commerçants et je fus toujours normalement rétribué.

J’ai dû, pour raisons de santé, quitter ma situation.

Entre temps, DAUDET, avait fondé l’Office Fédéral de vente de participations à la Loterie Nationale il en était le propriétaire et le siège situé 9 cité du Retiro.

Après ma maladie je suis entré à nouveau en relations avec lui pour la vente de ses billets.

Au cours de notre collaboration, en août 1937, j’ai été amené à remettre à Daudet, pour dix-huit mille francs, de billets de la Loterie Nationale, m’appartenant.

DAUDET les plaça mais à ce jour, malgré mes diverses réclamations, je ne suis pas encore rentré dans mes fonds, j’ai d’ailleurs pour ces faits, déposé plainte entre les mains de M. le Procureur de la République.

En ce qui concerne mon activité au sein de la Confédération des Comités de Salut Public, et plus particulièrement au journal « FORCES FRANCAISES » je préciserai que DAUDET m’avait sollicité, courant mai 1938, pour faire des démarches publicitaires auprès de maisons de commerce, afin d’alimenter la publicité du journal FORCES FRANCAISES qu’il venait de créer, et dont il était le propriétaire.

J’ai accepté, et par lettre en date du 26 mai 1938 signée Georges DELHAUME, directeur général de FORCES FRANCAISES, il m’accréditait ainsi auprès des maisons de commerce que j’étais amené à visiter.

Seul ou en sa compagnie, j’ai effectué de nombreuses démarches et chaque fois, selon les instructions que DAUDET m’avait données, indépendamment des contrats, je sollicitai des fonds pour les Comités de Salut Public.

Ma mémoire défaillante ne me permet pas de vous indiquer les noms de toutes les personnes visitées.

Toutefois, voici deux démarches dont je me souviens parfaitement.

Je me suis présenté à plusieurs reprises sans jamais avoir été reçu au domicile de M. ROLAND de L’ESPEE, domicilié avenue Foch N° 26, je crois, car DAUDET, m’avait dit que ce dernier devait lui remettre une somme de six à dix mille francs.

J’ai même eu l’occasion, en compagnie de DAUDET, de me présenter au domicile de M. de L’ESPEE, mais ce dernier absent, s’était fait excuser, par son concierge.

Enfin, DAUDET me fit porter au domicile de M. de L’ESPEE, une lettre écrite par lui, mais signée de son nom par les soins de sa secrétaire, Mme MOURET. Je n’ai pu remettre cette lettre en mains propres, le destinataire étant à son château de Saint-Germain.

Vers la fin août DAUDET, me charges de porter une lettre au 22 de la rue de Lille, je l’ai déposée chez le concierge.

Quelques temps après, il me demanda de l’accompagner à cette adresse, où il pénétra seul, me laissant sur le trottoir. Je m’aperçus alors seulement qu’il s’agissait de l’Ambassade d’Allemagne.

Par la suite, je devais l’accompagner à cet endroit, à deux ou trois reprises.

Il me confia qu’il devait toucher des fonds du « comité France Allemagne » et que ceux-ci devaient lui être remis directement par l’Ambassade d’Allemagne.

J’ignore si en définitive, DAUDET a touché des fonds, mais ce qui est certain c’est que c’est à cette époque, qu’il fit agrandir son bureau de la Cité du Retiro.

Entre temps, DAUDET m’avait demandé d’être le gérant du journal FORCES FRANCAISES et c’est dans ces conditions que le 22 septembre 1938, j’en ai fait la déclaration au Parquet de la Seine, que j’ai résiliée au début de 1939.

En fait, deux journaux seulement ont paru, sous ma signature, ce sont les N° 3 et 4 de l’année 1938.

Si j’ai accepté d’effectuer ces démarches, pour le compte de DAUDET, en tant que propriétaire de FORCES FRANCAISES, c’est que j’espérais toujours entrer en possession des 18.000 francs provenant de la vente de mes carnets de billets de la Loterie Nationale, par ce dernier.

D’autre part, n’ayant jamais été rémunéré, de toutes mes démarches, et surtout aussi tout ce que celles-ci avaient d’anormal, j’ai décidé de ne plus avoir aucune relation avec lui.

Il parait utile de mentionner en ce qui concerne la déclaration du sieur LELIEVRE, que ce dernier est de santé précaire, il doit entrer prochainement dans un sanatorium.

De plus, il est atteint d’amnésie intermittente et c’est ce qui explique les imprécisions de sa déclaration.

Les dames MOURET Madeleine, née BARBIER, le 22 février 1903 à Charenton (Seine), et MOREAU Simone, née le 12 octobre 1920 à Tonnerre (Yonne), secrétaires du sieur DAUDET, ainsi que Messieurs VERNAY et LELIEVRE, ne sont pas notés aux Sommiers Judiciaires.

*****Nouvelle page*****

PARQUET DE LA COUR D’APPEL DE PARIS                                                      Paris, le 9 mai 1939

N° 2046 Presse

Service central

Le Procureur Général près la Cour d’Appel de Paris

à Monsieur le Grade des Sceaux

Direct : Criminelle

1er Bureau

2 BL 52/R

Objet : Dessaisissement au profit de l’Autorité Militaire – aff. c/DAUDET

du chef de propagande étrangère

J’ai l’honneur de vous rendre compte, comme suite à mon rapport du 9 mai 1939 relatif à l’information suivie contre DAUDET, du chef de propagande étrangère, que M. COMBEAU, juge d’instruction, a rendu, le 26 septembre écoulé, sur les réquisitions conformes de mon Substitut de la Seine, une ordonnance de dessaisissement au profit de l’Autorité Militaire.

Le Procureur Général

Audition Eugen Feihl, septembre 1946

AN F7/15327

p. 83-84

La France au Travail-

« La France au Travail » a été fondé par l’Ambassade peu de temps après notre arrivée. La première rédaction a été dirigée par OLTRAMARE et, après son départ, par Georges DAUDET qui n’était pas journaliste et a rempli les fonctions de directeur administratif.

Ce quotidien était bien entendu géré, administré et subventionné par nous. Le personnel était payé avec les bénéfices ou sur les subventions lorsque l’exploitation était déficitaire ce qui arrivait assez souvent. Ce personnel a d’ailleurs changé fréquemment et était surtout composé d’individus douteux, à moralité très élastique.

Au début les articles étaient dictés par l’Ambassade mais peu à peu les rédacteurs ont pris quelques initiatives personnelles. En général le ton était socialisant et ce quotidien a d’ailleurs adopté le titre « La France Socialiste » pour capter la confiance des milieux syndicaux. C’est surtout M. ACHENBACH qui a donné les directives politiques.

Le succès de cette feuille a eu des hauts et des bas et ses artisans ont surtout poursuivi un but lucratif.

Plus tard, ordre a été donné à HIBBELEN par ACHENBACH ou SCHWENDEMANN d’inclure ce journal dans son trust et d’en assurer l’assainissement. Il s’agissait là d’une affaire pas très propre et j’ai évité autant que possible de m’en mêler.

p. 102

(…) Par la suite, HIBBELEN a su gagner la confiance de M. SCHWENDEMANN ainsi que celle du Ministre SCHLEIER. Sauf erreur, il fut désigné pour mettre de l’ordre dans l’administration du journal « La France au Travail » dont la gestion financière était tout à fait irrégulière. Il avait surtout l’ambition de faire de ce journal un organe susceptible de rapporter de gros bénéfices en renonçant au besoin à une propagande trop accentuée dans le sens de la collaboration afin de gagner la confiance des lecteurs. Cette affaire était menée en contradiction avec la politique de M. ACHENBACH qui avait fait nommer comme directeur un certain Monsieur DAUDET. Sauf erreur, « La France au Travail » avait, à cette époque-là, déjà changé de nom en « La France Socialiste ». DAUDET dont on prétendait qu’il avait un passé obscur, avec un casier judiciaire assez chargé, était protégé par ACHENBACH je ne sais pourquoi. Moi-même je considérais DAUDET comme un affairiste effréné et peu social envers ses employés.

Le Cercle Européen, rapport du commissaire Mathieu

AN 3W/68, Jean Berthelot

(…)

De nombreuses personnalités françaises et étrangères ont accepté de faire partie du Comité d’honneur du « CERCLE EUROPEEN », et sur une liste établie en janvier 1942, on relève entre autre les noms de Pierre LAVAL, Abel BONNARD, BONNET, ancien Ministre, Fernand BOUISSON, ancien Président du Conseil et de la Chambre, Dr BREMER, de l’Institut Allemand, Alfred BOFINGER, Intendant Radio-Stuttgart, Commandant Pierre CONSTANTINI, Guy CROUZET des « Nouveaux-temps », Georges DAUDET, journaliste, Marcel DEAT, Jacques DORIOT, Dr FLONER, industriel allemand, Dr FRIEDRICH, Eugène GERBER de « Paris-Soir », Pierre GUERLAIN de l’Agence Economique et Financière, Maurice LEVILLAIN, Conseiller Municipal de Paris, Adrien MARQUET, Maire de Bordeaux, ORLANDINI, Consul général d’Italie, SCHLEIER, Ministre d’Allemagne, SCHMIDT de l’Ambassade d’Allemagne, Georges SUAREZ, journaliste, etc…

Police suisse : suivi du réfugié G. Daudet

Archives fédérales suisses, AF, E 4320(B) 1991/243/133, dossier C.13.2383

C.13.2382.Mü/j

Note complémentaire de l’inspecteur Müller du 6.10.47

(…)

C’est M. Jardin, ancien chargé d’affaires à l’Ambassade de France à Berne, qui, sur les conseils de BAECHTOLD, chef de la « FREPO », lui aurait recommandé de se rendre en Valais. Ajoutons que le canton du Valais n’est pas disposé à autoriser DAUDET à habiter sur son territoire.

Aucune proposition ne devra être faite à la Police fédérale des étrangers au sujet de cette affaire sans en référer à M. Dubois. Le cas DAUDET l’intéresse tout spécialement, cet étranger ayant été en contact à Paris avec Oltramare et pouvant éventuellement être appelé à témoigner au procès de ce dernier.

CANTON DU VALAIS

BUREAU CANTONAL DES ETRANGERS

Sion, le 29 septembre 1949

Procès-verbal d’audition

Q.  Veuillez nous indiquer quelles démarches vous avez effectué dans le but de préparer votre émigration ?

R. Jusqu’à maintenant, je n’ai fait aucune démarche auprès d’autorités officielles, toutefois j’ai été en rapport et je suis encore à l’heure actuelle avec des ressortissants français habitant l’Argentine qui se préoccupent de me trouver là-bas une situation.

Un ancien diplomate français en Suisse, habitant actuellement votre pays s’occupe également de moi dans le même sens.

(…)

Nous vous signifions que les autorités fédérales sont disposées à prolonger votre autorisation de séjour et à ne pas retirer momentanément votre permis de conduire, cependant vous devez vous rendre compte que votre séjour en Suisse n’est que temporaire et que vous devez le mettre à profit pour préparer votre émigration.

 

C.13.2382

Note de l’inspecteur Müller du 18.10.51

(…)

DAUDET réside à Sion ou dans la région depuis le 20 septembre 1947. Les autorités valaisannes émirent d’abord un préavis catégoriquement négatif quant au séjour de cet étranger dans le canton, mais elles revinrent sur leur décision le 15 janvier 1948 pour des raisons d’humanité.

(…)

Depuis septembre 1949, date de notre dernière intervention auprès des autorités valaisannes, ayant pour but de pousser DAUDET à tout mettre en œuvre pour préparer son émigration, ce dernier n’a certainement plus rien fait pour essayer de quitter la Suisse ou pour obtenir une révision de ce procès.

C.13.2382

Note de l’inspecteur Müller du 30.4.53

(…)

L’intéressé occupe toujours l’emploi qui lui a été offert à l’époque par la maison DUC. DAUDET ne parait pas avoir fait des démarches particulières pour quitter la Suisse. Il a pris récemment contact avec le directeur du Bureau cantonal des étrangers du canton du Valais pour lui demander s’il pourrait, même au cas où sa situation serait définitivement éclaircie en France, espérer une autorisation de séjour en Valais.

Il faut croire que DAUDET n’a nullement l’intention de retourner dans son pays.

Le permis de séjour de DAUDET arrive à échéance le 30.4.1953. Il a laissé entendre au Bureau cantonal des étrangers qu’il ferait un rapport détaillé sur son actuelle situation.

C.13.2382.Mü/j

Note de l’inspecteur Müller du 23.9.54

(…)

Je me suis laissé dire que DAUDET, avec les appuis dont il dispose en Valais, ne tarderait pas à faire une demande tendant à l’obtention de l’établissement.

Absolument rien de défavorable ne nous est signalé quant à la conduite ou au comportement de DAUDET.

32) Archives fédérales suisses, AF, E 44264 2015-276 110 3

MINISTERE PUBLIC FEDERAL

Berne, le 1er Juin 1957

Monsieur A. Blanc

Chef de la police cantonale des étrangers

Sion

N° C.13.3282 A/1e

Cher Monsieur Blanc,

Je me réfère à votre audition du 31 mai 1957 auprès du Chef de la Police Fédérale, accompagné de Monsieur le Maire et Conseiller National Bonvin, au sujet de l’affaire du réfugié français

Daudet Georges, né le 11.3.1902, Administrateur, époux de Madeleine née Brugnon, née le 6.6.1921 (4 enfants), représentant de la société Ch. Duc S.A. à Sion, demeurant à Sion, Avenue de la Gare, Villa Pré Fleuri,

nous avons l’honneur, après vérification de cette affaire, de vous informer de ce qui suit :

En nous appuyant sur ladite audition, nous avons pris connaissance du fait que le département de la justice et de la police du canton du Valais fait une demande formelle de libérer Daudet du contrôle du Ministère Fédéral sous lequel il se trouve par application de l’article 21, Paragraphe 4 de la prescription d’exécution du 1er mars 1949 de la loi fédérale concernant le séjour et l’installation des étrangers qui dépend du contrôle du Ministère public fédéral. Monsieur le Conseiller national et Maire Bonvin, que Monsieur Daudet connait personnellement, soutient cette requête. De plus, nous avons appris que Daudet va se renseigner dans peu de temps sur le droit de citoyenneté suisse. Les services compétents du canton du Valais se sont basés sur le fait que, depuis 1947, Daudet habite en Valais et s’est bien conduit depuis.

Ainsi que nous vous l’avons dit, jusqu’à maintenant, le Ministère public fédéral n’a pas libéré les soi-disant collaborateurs français qui se trouvent réfugiés en Suisse sans raison majeure.

En s’appuyant sur votre intervention, ainsi qu’en raison du fait que le comportement de Daudet n’a donné lieu à aucune plainte depuis 1947, nous sommes d’accord pour libérer Daudet de notre contrôle. Nous n’avons pas d’objection à l’octroi d’un permis de séjour permanent.

Veuillez agréer, cher Monsieur Blanc, l’assurance de notre très haute considération.

Le Ministère public fédéral

L’adjoint

CC :     Monsieur le Conseiller National et Maire Bonvin ; Service de la police, Berne ; Service de la police des affaires étrangères, Berne

Élection municipale du 16 février 1936

Le Petit Parisien du 17 février 1936

1ère page, 4ème colonne

M. Lanote (U.R.N.) succède à M. Bellan comme conseiller municipal du quartier du Mail

Dans le IIème arrondissement, quartier du Mail, le scrutin de ballotage pour l’élection d’un conseiller municipal, en remplacement de M. Léopold Bellan, décédé, a donné les résultats suivants :

Sur 2.797 inscrits et 1.917 suffrages exprimés, M. Lanote, U.R.N., a été élu par 1.002 voix contre 760 à M. Delon, comm., et 129 voix à M. Georges Daudet, rép.

Élection législative du 27 avril 1936 – Lettre d’Armand Lanote à Paul Reynaud du 14 avril 1936

AN 74AP/8

 On trouve dans les archives de Paul Reynaud (AN 74AP/8) une lettre datée du 14 avril 1936 qui lui a été adressée par Armand Lanote (élu par 2002 voix, 129 pour G. Daudet), lui communiquant à sa demande des renseignements à propos de G. Daudet (adresse, profession).

 Lettre sur papier à en-tête du Conseil Municipal de Paris, adressée par Armand Lanote à « Monsieur Paul REYNAUD »

Mon Cher Ministre,

J’ai pu vous faire allouer pour votre campagne électorale sur notre publicité une somme de 2.000 frs. que je verse au Comité du Mail pour le soutien, dans ce quartier, de votre campagne.

Je vous donnerai ultérieurement l’emploi de cette somme.

Sous ce pli, je vous remets les renseignements qui me sont parvenus sur le personnage que vous connaissez.

Je crois qu’il serait indispensable que vous préveniez le Président des Hôteliers Parisiens avec lequel, je crois, vous êtes très bien, de prendre des renseignements à l’Hôtel Métropole, 17 Bd. Magenta.

Si, par ailleurs, nous pouvions avoir des renseignements près de Netter, ce serait parfait.

Enfin, Boby Prade pourrait peut-être vous avoir des renseignements puisqu’il travaille, je crois, à la construction des lignes souterraines du Métro.

Croyez, Mon Cher Ministre, en mes sentiments dévoués.

Élection législative du 27 avril 1936 – Résultats du premier tour : Le Petit Journal 27 avril 1936

1ère page, 1ère colonne.

 DEUXIEME ARRONDISSEMENT

Circonscription unique

Inscrits : 11.637 – Votants : 10.372

MM. Paul Reynaud anc. min. rép. nation, dép. sort 2.971
Dailly c. m. rép. nat. ind. 2.705
Delon comm. 2.229
Gindre rad. soc. 1.157
Delcambre s.f.i.o. 580
Dacqmin un. soc. 388
Georges Daudet rép. ind. 47

Ballotage

(M. Paul Reynaud avait été réélu en 1932

au premier tour par 5.342 voix contre 2.431

à M. Addé-Vidal, rad. soc.)

L’Humanité du 27 avril 1939

1ère page, dernière colonne

De la désertion à la trahison

(…)

Chaque jour, sans que s’en inquiète le gouvernement, surgissent de nouvelles feuilles suspectes, qui jettent la même boue sur l’Angleterre et sur la Russie soviétique.

L’une d’elles, éditée Cité du Retiro (sic), à Paris, étale -sous le titre de « Forces Françaises » s’il vous plait – la propagande nazie la plus éhontée, criant à coups de faux à la « perfidie soviétique » et injuriant « John Bull, l’embusqué n°1 » (le jour de la conscription anglaise !).

Pour que nul doute de ses inspirations, elle accuse la France même et l’Angleterre « ces puissances impériales nanties », de s’accrocher à « une conception périmée de l’équilibre européen ».

C’est la voix de Hitler et de Mussolini en plein Paris.

(…)

P.-L. DARNAR