Condamnation par la Cour de justice de la Seine – Jugement du 14 novembre 1947

Archives Nationales, Z/6/417 dossier 4221

COUR de JUSTICE

QUATORZIEME SOUS-SECTION DEPARTEMENTALE de la SEINE

DOSSIER N° 4221

Audience du 19.11.1947

ARRÊT qui condamne

par contumace

le nommé

DAUDET Georges

à la Peine de Mort

à l’affichage et aux dépens ; à la D. N.

Prononce la Confiscation de ses biens au profit de la Nation

L’an mil neuf cent quarante-sept, le dix-neuf Novembre à quatorze heures trente minutes, Monsieur BOUTIN-DESVIGNES Président de la Cour de Justice, Quatorzième Sous-Section Départementale de la Seine, Messieurs LEBON Raoul, RABELLE Eugène, CHAPELLIER Félix et MALON Pierre Jurés Titulaires du Jugement. Membres de la Cour de Justice, Monsieur REMONDAY Auguste Juré Suppléant, Monsieur HUGOT désigné pour remplir les fonctions de Commissaire du Gouvernement près la Cour de Justice et Maître CORNATON Greffier se sont réunis dans la salle d’audience de ladite Cour de Justice.

Les jurés ayant pris place aux côtés de M. le Président et ayant prêté le serment prescrit par l’article 312 du   Code d’Instruction Criminelle ainsi que cela est constaté au Procès-Verbal de Prestation de Serment en date du dix-sept Novembre mil neuf cent quarante-sept, les portes de l’auditoire étant ouvertes et l’audience étant publique M. le Président a constaté le défaut de l’accusé.

Monsieur le Greffier a donné lecture de l’Exposé des faits rédigé par M. le Commissaire du Gouvernement ainsi que de la citation Introductive d’Instance. Il a également donné lecture de l’Ordonnance préparatoire à contumace rendue par M. le Président.

M. le Commissaire du Gouvernement a développé les charges qui appuyaient l’accusation et a requis l’application de la loi pénale par contumace.

M. le Président a déclaré que les débats étaient terminés et a donné lecture des questions auxquelles la Cour aura à répondre et résultant de la Citation Introductive d’Instance.

M. le Président et les jurés de jugement se sont ensuite retirés dans leur chambre des Délibérations, le juré suppléant a été conduit dans une autre chambre séparée de la chambre des Délibérations de la Cour de justice.

Après avoir délibéré, M. le Président et les jurés étant rentrés dans l’auditoire, y ayant repris leurs places, l’audience étant toujours publique M. le Président a donné lecture des réponses faites par la Cour de Justice aux questions posées et a prononcé l’arrêt suivant :

LA COUR

Vu l’exposé des faits en date du ———————–
rédigé par M. le Commissaire du Gouvernement, concluant au renvoi devant la Cour de Justice du nommé DAUDET Georges Adrien Valentin  âgé de 45 ans, né le 11 mars 1902 à Chaillac (Indre) de Adrien Joseph Louis et de  Valentine Beaudet, journaliste ayant été domicilié à Paris (17e) 181 rue Legendre sous l’accusation de s’être rendu coupable dans les conditions énoncées aux articles 1 et 2 de l’Ordonnance du 28 Novembre 1944 du crime d’intelligence avec l’ennemi prévu par l‘article 75-5 du Code Pénal

VU l’exploit en date du 11 Août du Ministère de Me Ch. BESME Huissier-Audiencier près la Cour de Justice, portant citation au dit accusé d’avoir à comparaître devant la Cour de Justice Quatorzième Sous-Section Départementale de la Seine à l’audience du cinq septembre 1947.

VU le Procès-Verbal de M. le Commissaire du Gouvernement dressé en exécution de l’article 22 de l’Ordonnance du 28 novembre 1944 constatant le défaut du dit accusé.

VU l’Ordonnance en date du 5 septembre 1947 rendue par M. le Président de la Cour de Justice, septième Sous-Section Départementale de la Seine, fixant à l’audience du dix-neuf Novembre 1947 l’examen de cette affaire.

CONSIDERANT qu’à la date du 27 octobre 1947 cette Ordonnance a été affichée à la porte de l’immeuble sis à Paris (17e) 181 rue Legendre dernier domicile connu de l’accusé.

CONSIDERANT qu’à la date du ———— cette même Ordonnance a été insérée dans le Journal « Ce Matin ».

Qu’ainsi toutes les formalités de publicité prévues par la loi ont bien été accomplies.

VU les questions posées et les réponses faites à ces questions lesquelles sont ainsi libellées :

1ère QUESTION.-

DAUDET Georges accusé contumace est-il coupable d’avoir à Paris et sur le Territoire National de la France au cours des années 1940 à 1944 en tout cas entre le 16 Juin 1940 et la date de la libération, en temps de guerre, étant Français, entretenu des intelligences avec l’Allemagne (ou avec ses agents) ?

Réponse : OUI à la majorité

2ème QUESTION.-

L’action ci-dessus spécifiée sous la question précédente a-t-elle été commise avec l’intention de favoriser les entreprises de toute nature de l’Allemagne, puissance ennemie de la France et les Nations Alliées en guerre contre les Puissances de l’axe ?

Réponse : OUI à la majorité.

A la majorité des voix il n’existe pas de circonstances atténuantes en faveur de l’accusé.

Après en avoir délibéré conformément aux dispositions de l’article 57 de l’Ordonnance du 28 Novembre 1944 en Chambre du Conseil sans désemparer.

CONSIDERANT qu’il résulte des déclarations de la Cour de Justice que le nommé DAUDET Georges est coupable d’avoir à Paris et sur le Territoire National de la France au cours des années 1940 à 1944 en tout cas entre le 16 Juin 1940 et la date de la libération, en temps de guerre, étant Français, entretenu des intelligences avec l’Allemagne ( ou avec ses agents) en vue de favoriser les entreprises de toute nature de cette puissance étrangère contre la France et les Nations Alliées en guerre contre les Puissances de l’axe (Crime prévu et réprimé par l’article 75-5 du Code Pénal – Décret-Loi du 29 Juillet 1939.

CONSIDERANT que les faits ci-dessus sont déclarés constants par M. le Président et le jury de Jugement de la Cour de Justice.

VU la Décision Judiciaire qui est ainsi libellée :

« A la majorité des voix : peine de Mort – Dégradation Nationale – Confiscation des Biens ».

La Cour, faisant application des articles 75 du Code Pénal paragraphe 5, 77 de l’Ordonnance du 28 Novembre 1944.

Condamne à la majorité des voix le nommé DAUDET Georges A la Peine de Mort.

Ordonne que cette peine sera exécutée dans les conditions prévues par le Code de Justice Militaire conformément aux dispositions de l’article 77 de l’Ordonnance du 28 Novembre 1944.

VU l’article 79 de l’Ordonnance précitée, Prononce la confiscation totale au profit de la Nation de tous les biens présents et à venir du condamné DAUDET suivant les dispositions de l’article 37 du Code Pénal et les prescriptions des articles 38 et 39 du même Code.

Déclare en outre DAUDET Georges en état d’indignité nationale et le condamne à la Dégradation Nationale suivant les dispositions de l’article 21 de l’Ordonnance du 26 décembre 1944.

Vu l’article 18 de la loi du 16 Mai 1855 sur les Droits de Poste et les dispositions de l’article 63 de l’Ordonnance du 28 Novembre 1944.

Condamne DAUDET Georges aux frais du procès envers liquidés à la somme de Quatre Cents francs plus Deux Cents Cinquante francs pour Droits de Poste.

Ordonne que le présent arrêt sera exécuté à la diligence de Monsieur le Commissaire du Gouvernement près la Cour de Justice.

Et VU les articles 25 de l’Ordonnance du 26 Décembre 1944 et 36 du Code Pénal :

Ordonne l’impression et l’affichage du présent arrêt aux frais du condamné.

Fait et prononcé au Palais de Justice, à Paris le Dix-neuf Novembre mil neuf cent quarante-sept, en audience publique de la Cour de Justice, Quatorzième Sous-Section Départementale de la Seine les débats du Procès ayant eu lieu publiquement où siégeaient Monsieur BOUTIN-DESVIGNES Président, Messieurs LEBON, RABELLE, CHAPELLIER et WALON Pierre Jurés Titulaires du Jugement, Membres de la Cour de Justice.

Et ont signé le présent arrêt, Monsieur BOUTIN-DESVIGNES Président et Maître CORNATON Greffier.

Le Président                                                                                    Le Greffier

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