Socialisme et Liberté n° 15 (15 décembre 1942)

L’organe du Comité d’Action Socialiste, dans son numéro du 15 décembre 1942, évoque le rachat de l’Effort par Georges Daudet dans un article intitulé « RIEN A FAIRE »

RIEN A FAIRE
A Paris, la France Socialiste a été fondée d’entente avec l’Okkupant par un capitaliste véreux, ami de S. E. de Brinon : G. Daudet. Dans l’autre zone, à Lyon, ce Daudet a acquis de ses derniers (les Allemands) le journal l’Effort, fondé jadis par le pourri Gaillard avec les deniers du Populaire et où il a fichu dehors le décérébré Sp masse. A Paris, c’est le petit Chateau, ex-députaillon radical, qui tient la plume, A Lyon, c’est le minuscule Rives, ex-députaillon socialiste.
Deux journaux, même besogne. Il s’agit d’amener au fascisme les socialistes et les syndicalistes. Car les Dumoulin, le Lafaye, les Mesnard et autres Dooghe muselés ne font pas suffisamment nombre au gré de l’Okkupant.
Malgré toutes les courtisaneries dont ils nous comblent, ni la France ni l’Effort n’ont réussi à mordre tant soit peu sur les gros bataillons de la classe ouvrière. Ainsi que la relève, ce four noir, l’a fait voir.
Alors on s’ingénie à démontrer aux travailleurs que la Révolution nationale a été salement défigurée — la pauvre ! — par les réacteurs de Vichy, qu’une vrai Révolution nationale (Made in Germany l) se prépare grâce à ce parti unique qui sortira demain de la manche de Laval, et qu’enfin ce parti unique ne vaudra que si socialistes et syndicalistes, y compris les fonctionnaires hier encore syndiqués, se décident à y entrer en colonnes épaisses.
C’est à les y décider que s’évertue le petit Chateau. Il s’est adressé spécialement, à cet effet, aux socialistes. Pas à ceux qui suivaient Blum et sa « secte belliqueuse », bien entendu, bien sûr! Mais à ceux qui suivaient Paul Faure, lequel, au dire du Chateau, « avait mordu plus profond qu’on ne croit ».
Avec les premiers, rien à faire, avec les seconds, on peut tenter le coup. Ils ont résisté jusqu’ici, toujours selon le Chateau, aux contagions gaullistes et. bolchevistes, mais ils boudent la Révolution nationale. Le moment est venu de « dégeler cette bouderie ». Comment? En mettant résolument le cap sur une Révolution nationale « ardemment anti-capitaliste et européenne ».
Sans s’abaisser à polémiquer avec un Chateau, petit reïtre de plume sans autorité sur personne. Socialisme et Liberté démontrera que cette Révolution « ardemment anti-capitaliste et européenne » n’est qu’une mystification kolossale sortie des bureaux de M. Goebbels ; qu’elle n’est ni anti-capitaliste, ni européenne, mais étatiste et allemande ; qu’elle ne touchera ni à la propriété ni au profit, ces deux piliers de l’ordre capitaliste, ni au nationalisme, dont elle ne fera qu’aggraver d’antisémitisme abject la malfaisance classique.
Pas plus par les raisonnements que par la menace, celle-ci dût-elle passer aux actes, la Révolution dite nationale, n’entamera la classe ouvrière, récalcitrante à toutes les idéologies qu’on cherche à lui imposer de vive force et fidèle à la seule révolution qui la délivrera du capital et de la guerre : la Révolution sociale. — N. M.

Source : www.retronews.fr/journal/socialisme-et-liberte/15-dec-1942/4764/5743258/1

Table des matières

Bibliographie

Documents signés (ou co-signés) G. Daudet ou publiés sous un pseudonyme

Décisions de justice

Rapports de police

Autres sources

Bibliographie

Documents signés par Georges Daudet

Autres sources

Pascal Ory, Les Collaborateurs 1940-1945, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points. Histoire » (no 43), 1980 (1re éd. 1977), VI-331 p.

Chapitre 7. Les enfants du paradis. Une gauche socialiste et nationale.

Page 142

Entré à l’automne 1940 à l’Œuvre, il (René Château) acceptera un an plus tard de donner son nom à la direction politique du nouveau quotidien « inspiré » de la classe ouvrière, La France socialiste. Georges Daudet en a amélioré la composition, les relations publiques et la rédaction (…)

Pierre-Marie Dioudonnat, L’argent nazi à la conquête de la presse française, 1940-1944, Paris, Editions Jean Picollec, 1981, 309 p. (ISBN 2-86477-029-6)

Chapitre 8. Avantage à la rue de Lille

p. 156

La direction administrative de La France socialiste réunit le comptable Léon James, administrateur, René Saive, secrétaire général, et Georges Daudet, Directeur général, que nous avons déjà rencontrés à La France au travail. Comme il l’était de La France au travail, Daudet est propriétaire de La France socialiste. Prête-nom de l’ambassade, il apporte ce quotidien à la Société populaire d’éditions et d’impressions formée le 10 juin 1942 pour l’exploiter : cette société à responsabilité limitée au capital de 1 million de francs divisé en 2000 parts de 500 francs groupe trois associés, Georges Daudet, qui reçoit 600 parts en rémunération de son apport (le journal) estimé à 300 000 francs ainsi que la gérance, René Lelief et Louis Thomas, déjà cités à propos de de la Société parisienne d’édition, qui apportent chacun 350 000 francs et se voient donc attribuer l’un et l’autre 700 parts. A quelques temps de là, les parts de Lelief sont reprises par la Société parisienne d’édition elle-même.
La Société populaire d’éditions et d’impressions est partie intégrante du trust Hibbelen et sa création, comme celle du trust lui-même, répond manifestement au besoin de rationaliser les bases de la pénétration allemande dans la presse en adoptant un système qui résiste à l’épreuve du droit, c’est-à-dire fondé sur les règles simples de l’appropriation capitaliste.

p. 163

Robert Rodier apparaît en janvier 1943 comme administrateur-gérant de La Terre française et gérant de la Société de publications économiques, charges auxquelles il joint celles de gérant de l’Agence française de documentation internationale (avec R. Pecquery, avril 1944) et de la Société populaire d’éditions et d’impressions (avec G. Daudet, juin 1944).

p. 200-201

En novembre 1942, mois décisif à tous égards, l’Effort, dont Spinasse, considéré comme élément douteux, s’est définitivement séparé, change de mains et se transforme en filiale lyonnaise de la Société populaire d’éditions et d’impressions qui édite à Paris La France socialiste.